Au cinéma, on parle de "plan de coupe" : c’est ce que la parenthèse est à la parole ou au texte.
Cette parenthèse-là, Kevin Jordan O’Shea la laisse s’épanouir dans l’intimité, à la fois
unique et banale, que la photographie sert si bien quand elle préserve le silence du spectateur.
C’est d’abord la maison et la tranquille géométrie inspirée du sweet home anglo-saxon, dont Kevin Jordan ouvre la porte sur le ton, à la fois savant et improvisé, de l’artiste.
Très vite, la vie s’approprie l’enceinte protectrice et tranquille du bonheur, dans une lumière pleine qu’on imagine du matin et qui baigne le chaleureux désordre des joujoux.
Mais on ne s’y trompe guère : la séquence d’images, qui résonne avec la couverture d’un roman au titre anglais et ambigu, interroge autant qu’elle partage, comme ferait un visiteur entré sans avoir frappé à la porte.
Au lecteur, donc, d’endosser l’audace du cambrioleur d’impressions pour s’introduire dans une demeure plongée dans la quiétude d’un conte de fées, et n’y laisser que l’empreinte de son ombre.
Hervé Le Goff